Chevènement et les sanctions contre la Russie : la crise est très grave

Publié le par Michel Sorin

Au-delà de l’Ukraine, c’est le problème du projet de la France qui est posé

 

Le 23 septembre 2014, avait lieu à Paris le colloque de la Fondation Res Publica sur le thème La Russie en Europe. La salle était pleine et les jeunes particulièrement nombreux. Non seulement ces colloques sont de très haut niveau, mais les comptes rendus complets sont mis sur le site de la Fondation, donc à la portée de tous. Voir Actes des colloques et des séminaires de la Fondation

Vous trouverez, entre autres, les actes du colloque du 9 juin 2008 pour lequel Jean-Yves Autexier, qui était alors directeur de la Fondation, m’avait demandé d’intervenir. Voir Quelle politique agricole, au défi de la crise alimentaire mondiale ?

Pour en savoir plus sur cette Fondation créée par Jean-Pierre Chevènement, voir Présentation de la Fondation Res Publica.

Rappel sur le colloque du 23 septembre 2014 :

- Crise ukrainienne, crise Europe-Russie : Chevènement au coeur du débat

- La Russie et les sanctions : son retournement vers l'Asie est irréversible

Ce qu’a dit Jean-Pierre Chevènement

Jean-Pierre Chevènement a d’abord évoqué le voyage de quatre jours qu’il vient de faire en Russie, en tant que représentant de la France. C’est la crise la plus grave depuis que la Russie existe, après la fin de l’URSS. C’est un pays qui est très engagé dans la mondialisation (commerce extérieur : 635 milliards d’euros) et est en train de basculer vers l’Asie. L’économie russe résiste bien. L’Ukraine est un enjeu très important en géopolitique. Après l’escalade, l’accord de Minsk a débouché sur un cessez-le-feu qui est appliqué (dans deux régions « oblasts »). Le rôle de la France a compté (rencontre en Normandie, notamment). L’application de l’accord d’association avec l’Union européenne a été reportée à décembre 2015. Porochenko et Poutine se parlent. Les élections législatives vont avoir lieu. Il y a le parti de la paix (Porochenko) et les autres, dont on ne connaît pas les objectifs. La voix de la raison doit se faire entendre.

Après les interventions des ambassadeurs Alain Dejammet et Marc Perrin de Brichambaut, de Jacques Sapir puis de la Secrétaire perpétuelle de l’Académie française, Hélène Carrère d’Encausse, le président Chevènement a repris la parole pour donner son point de vue sur l’évolution de la Russie. Le projet de Poutine est de moderniser son pays. Il n’est pas impérial mais national. La représentation de la Russie et de Poutine est défigurée par la russophobie. Cela peut se comprendre de la part de la nouvelle Europe (pays proches de la Russie, concernés directement par l’URSS) mais c’est aussi le cas de l’ancienne Europe, sous influence américaine.

La crise va avoir d’immenses conséquences, notamment au niveau du financement de l’économie russe. Les banques ont peur de se retrouver en infraction, du fait des sanctions. La France est très concernée (15 milliards d’euros d’investissements en Russie). Le retournement vers l’Asie va s’accélérer à cause des sanctions. L’Union européenne, qui est une zone de non croissance, est sous l’influence de la nouvelle Europe pour la politique à l’égard de la Russie.

Or, les russes sont fondamentalement européens. Les classes moyennes reconnaissent une amélioration de leur niveau de vie sous la présidence de Poutine, un style de vie civilisé. Les contestations de rue se sont estompées depuis la crise ukrainienne.

L’idéologie russophobe est mortifère. Jamais dans l’histoire, sauf du temps de Napoléon (mais l’adversaire était alors l’Angleterre), la France et la Russie ne se sont heurtées.

L’Europe européenne, chère à de Gaulle, est la bonne solution. Cela suppose de ne pas être à la remorque des pays de la nouvelle Europe.

Les USA, avec le traité transatlantique, veulent imposer leurs normes. La France est soumise aux USA, dans le cadre d’une politique occidentale qui ne répond pas aux intérêts bien compris de l’Europe. La France, préférant l’universalisme à l’occidentalisme, doit être un pont entre les pays occidentaux et les pays émergents. Le problème est très grave. La crise ukrainienne révèle que la France a un vrai problème, c’est son projet.

A un autre moment, Jean-Pierre Chevènement a parlé du mystère allemand. Plus de vingt ans après sa réunification, l’Allemagne n’a pas assimilé l’Europe européenne. Elle a des réactions surprenantes, compte tenu de son engagement avec la Russie.

En conclusion, il a considéré qu’il existe une autre stratégie et que les forces de la paix peuvent l’emporter, si la conscience progresse. Il espère que ce colloque y aura contribué.

Cet article est le 175ème paru sur le blog CiViQ et le 29ème dans la catégorie Europe Continent

Jean-Pierre Chevènement, le 23 septembre 2014, lors du colloque de la Fondation Res Publica

Jean-Pierre Chevènement, le 23 septembre 2014, lors du colloque de la Fondation Res Publica

Publié dans Europe Continent

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