Les livreurs de lait à Lactalis, très mal payés, selon FMB Grand Ouest

Publié le par Michel Sorin

 

France Milk Board exige une référence aux coûts de production

 

Les éleveurs laitiers livrant à Lactalis ont accepté une baisse des prix de leur lait au premier trimestre 2018. C’est ce qu’indique l’organisation de producteurs transversale (c’est-à-dire territoriale, le Grand Ouest de la France, ses adhérents étant livreurs à différentes laiteries privées) France Milk Board Grand Ouest, dans un communiqué de presse publié le 12 avril 2018. Est-ce en rapport avec la crise sanitaire de la contamination des laits infantiles qui a touché Lactalis en décembre 2017 ? La coïncidence de dates permet de le penser.

 

Ce qui est certain, c’est que les prix du lait payé aux éleveurs ne bénéficiant pas de contrats spécifiques (de qualité de type bio ou d’appellation d’origine contrôlée ou protégée) étaient en 2017 inférieurs aux coûts de production (intégrant, bien sûr, la rémunération du travail).

Voir (9 mars 2018) : EMB la réalité des prix de revient du lait.

 

Sur son blog pour les producteurs laitiers, FRANCE MILK BOARD GRAND OUEST a rendu compte des débats de son assemblée générale, le 14 février 2018.

Voir (19 février) article AG FMB GO.

 

Le bilan des Etats généraux de l’alimentation avait été fait et la question essentielle portait sur les moyens à prendre pour rapprocher le prix du lait des coûts de production enregistrés par la majorité des éleveurs concernés. Les premiers mois de 2018 ne laissent pas entrevoir une amélioration en ce sens. Pire, les organisations de producteurs (OP) livreurs à Lactalis semblent avoir entériné une baisse des prix sur le premier trimestre 2018 , ce qui pose la question du rapport de forces entre les OP rattachées à l’entreprise de collecte et l‘entreprise elle-même. Dans le cas de Lactalis, la question est posée.

Voir (12 avril 2018) : communiqué FMB GO + articles presse.

 

L’hebdomadaire La France Agricole pose la question « La guerre des OP est-elle déclarée ? » 

France Milk Board (FMB) estime que la formule de prix proposée par l’Union nationale des éleveurs livreurs Lactalis (Unell) « perd 30 € par mois sur le premier trimestre de 2018 ». L’organisation des producteurs Lactalis Grand Ouest (OPLGO) n’est pas non plus épargnée. « Les OP ne servent-elles pas les intérêts des industriels privés et des coopératives en se préoccupant plutôt de la gestion des volumes au détriment de la revendication d’un prix rémunérateur ? » FMB sort l’artillerie lourde, dans un communiqué paru le 12 avril 2018, et avance être « la seule OP à revendiquer un prix payé qui prend réellement en compte les coûts de production ». L’Unell est dans le viseur, taxée d’avoir proposé à Lactalis « une formule dite novatrice », qui « accuse une baisse de 30 € par mois par rapport à la formule contractuelle qui servait à la fixation du prix depuis 2011. Tous les producteurs Lactalis en France perdent donc 100 €/1 000 l sur le premier trimestre de 2018 ».

FMB propose une nouvelle formule « à tous ses industriels partenaires : les groupes Lactalis, Savencia et Sill et les laiteries Vaubernier et Saint-Père ». Les coûts de production y sont « intégrés à 50 %, avec comme indicateur l’indice Milc notifié par le Cniel tous les mois ». Sur la prise en compte des coûts de production, l’OP transversale accuse l’Unell de proposer « une valeur seuil de 340 € pour déclencher les coûts de production », et l’OPLGO de « proposer un point d’interrogation ». Avant de préciser que le rôle des organisations de producteurs n’est pas de « faire le jeu des industriels, qui se frottent les mains de voir que les OP divisent les producteurs au lieu d’être une force collective ». À bon entendeur…

FMB passe à l’offensive, persuadé que les textes concernant les organisations de producteurs et la contractualisation devront changer. Et le débat entre Lactalis et ses livreurs est posé depuis longtemps. Voir (5 septembre 2016) : Crise agricole : première confrontation Fnsea-Lactalis sur le prix du lait. Extrait.
Les OP rassemblées. Pour la première fois, les principales organisations de producteurs Lactalis étaient réunies pour négocier face aux dirigeants du groupe. Celles du Grand-Ouest (APLBL, OPLGO,et OPNC), le président de l'Unell (union nationale), Claude Bonnet, ainsi que Florent Renaudier, responsable de la section laitière de la FDSEA 53, moteur de l'action de la première semaine. Les représentants d'OP entendent « en tirer les leçons » pour envisager de travailler ensemble. Si elles parviennent à faire bloc dans les négociations (sur les prix, les volumes, les orientations stratégiques), cela s'avérera un atout indéniable dans les phases de négociations. « Nos OP vont devoir construire quelque chose ensemble. Le rassemblement d'un maximum de producteurs est nécessaire pour continuer à avancer, appuie Frédéric Lachambre, président de l'APLBL. On se doit d'aller vers une vraie organisation des producteurs livrant à Lactalis, qui ne pourra plus faire ce qu'il fait depuis cinq ans et devra revoir sa relation contractuelle avec ses producteurs ».

Ce conflit social Lactalis est la conséquence des erreurs de conception et de mise en œuvre de la contractualisation. « Il y a un avant et il y aura un après ». Rien ne sera comme avant pour Lactalis mais pas seulement. Voir à ce sujet sur le site du ministère de l'agriculture (8 février 2016) Mise en oeuvre de la contractualisation dans la filière laitière française le rapport** de Yves Berger, François Champanhet, Yves Marchal et Yves Riou.

Après les Etats généraux de l’alimentation, le projet de loi qui sera examiné fin mai à l’Assemblée nationale inverse la contractualisation. Ce serait désormais le producteur, ou l’organisation de producteurs (OP), qui soumettrait le contrat à l’acheteur de lait (l’industriel collecteur et transformateur).

Dans cette perspective, il est souhaitable que ce soit une organisation de producteurs territoriale qui soit reconnue comme étant l’interlocutrice de l’acheteur de lait. C’est ce qui explique la prise de position de FMB, qui est la seule à s’être structurée en tant que OP transversale (territoriale). Dans cette logique, si elle était poussée à bout, il serait préférable que les adhérents des coopératives laitières ne soient pas exemptés de l’adhésion à une OP territoriale. La loi en vigueur actuellement concernant la contractualisation ne concerne que les livreurs à des entreprises non coopératives.

Articles précédents sur ce thème :

- (10 novembre 2015) : Producteurs de lait européens : EMB et APLI en action

- (9 janvier 2016) : APLI BRETAGNE : causes de la crise laitière et moyens pour en sortir

- (21 février 2018) : Le Cniel propose un plan pour rassembler et relancer la filière laitière

- (3 avril 2018) : Lourdes menaces sur le secteur laitier, tensions sur l'avenir de la PAC

Cet article est le 432ème paru sur le blog CiViQ - le 149ème en catégorie Agriculture Alimentation
Les éleveurs membres du conseil d'administration 2018 de l'organisation de producteurs transversale France Milk Board Grand Ouest

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